LES UNES

Les parents partent en Californie, le fils s’arrête à Berlin ; le roman suivra les deux pistes narratives. Frédérique Fanchette nous présente Lutz Seiler, écrivain venu de l’Est, auteur avant tout de poèmes, mais qui vient de trouver dans l’histoire de ce passage à l’ouest l’argument de son roman.S’affranchissant de la demande parentale – rester sur place en ex-RDA – l’auteur part donc à Berlin et se cantonne dans quelques rues du même quartier. Il raconte alors une histoire dont les principaux éléments sont empruntés à sa propre vie, celle d’un serveur dans un bar underground « Le Cloporte » qui s ’inspire de l’Assel dans lequel l’auteur a travaillé pour de vrai : « On voudrait s’attarder au Cloporte, où se croisent ouvriers, tapineuses, soldats soviétiques sur le départ et anarchistes bourrés d’idées. Exemple : le recyclage des chiens de l’armée est-allemande pour aider dans la lutte contre les expulsions. » Du côté des parents, soleil et musique en Californie.

« Le Royaume désuni », voilà un titre qui tire l’œil même si Jonathan Coe a choisi en anglais celui de « Bournville ». Le cahier livres de La croix s’ouvre sur cet ouvrage qui « est porté, nous dit Nathalie Lacube, par le plaisir de conter qui est le style de Jonathan Coe. » L’argument en est simple, l’évocation de la vie de sa mère à travers quelques journées (sept) marquantes de l’Histoire britannique, mêlant certains personnages de romans précédents et famille royale. L’article donne à voir comme un archétype du roman anglais.

Pas de réchauffement pour le Figaro littéraire qui livre un dossier consacré aux auteurs des pôles. Patrice Franceschi et Alexis Jenni qui interrogent à travers leur expérience ou celle de leurs devanciers, tant littéraires qu’aventuriers, les limites de la nature humaine. C’est du moins l’orientation que donne Arnaud de La Grange à ce cahier dont la vedette reste cependant Jean Malaurie, centenaire cette année et qui publie ses mémoires. L’occasion de revenir sur son parcours « porté par ses travaux de cartographie, de géocryologie, de géomorphologie, mais également comme un être « hanté par le surnaturel » » L’idée qui domine la collection qu’il a dirigée est celle de la rencontre avec les humains de l’intuition qui pensent la nature différemment et d’un point de vue non systématiquement utilitariste.

Patrice Franceschi en est une illustration contemporaine dans la mesure où il participe à une expédition qui s’aventure en Arctique, dans des conditions parfois dures, avant d’aborder au Groënland en même temps que des paquebots géants. « le tourisme, la marchandisation du monde et sa numérisation sont aussi venus frapper le Grand Nord ».

« Le premier, Proust eut donc conscience que ses brouillons formaient une œuvre dans l’œuvre », nous dit Jean-Louis Jeanelle, en une du Monde des Livres, en indiquant que Marcel avait décidé de publier ses brouillons tels quels, reproduits en paperolles. Les deux ouvrages auxquels le critique nous introduit racontent, une ultime fois en cette année mémorielle, les « deux côtés » de Proust : les brouillons pour en retrouver le travail et l’œuvre quasiment de sculpture du texte et les documents nombreux amassés par l’un des plus grands admirateurs et fétichistes de l’œuvre de Proust, Pedro Corréa do Lago ex président de la Bibliothèque nationale du Brésil. Même si, comme le rappelle Jaenelle citant Barthes, « Les clefs ne renvoient pas à Proust mais au lecteur : les clefs, le désir, le plaisir des clefs est un symptôme de la lecture. »

Les clefs sont aussi l’une des questions du nouveau roman d’Antoine Volodine. Ou, si l’on préfère des trois récits hétéronymes, trois identités féminines différentes, des voix du courant qu’il a créé, celui du post exotisme. « On pourrait lire le passage d’un texte à l’autre comme un éloignement progressif du corps » nous dit Alain Nicolas dans L’Humanité. On va du coït présenté comme un viol (quel que soit le degré apparent de consentement) au politique en passant par l’accouchement symbolisé par ce titre Sous les viandes. Volodine poursuit son œuvre qui « se tourne contre les dominants, les « boyaux-démocrates » et leurs mensonges, leurs accommodations, leur « mépris des pauvres » ».

Dans le pêle-mêle

Un hommage aux femmes de la rentrée, celles qui ont eu un prix du moins, est à retrouver dans l’Huma sous la double signature de ceux qui les ont défendues dès le début de l’année et leur ont accordées quelques unes généreuses, Alain Nicolas et Sophie Joubert. A noter dans le MDL, un abécédaire proustien de Albaret à Zweig en passant par écolier, océan ou unanimité.

Portraits/Entretiens

Portrait d’un portraitiste cette semaine dans le Figlitt et rencontre avec Jean-Pierre Gibrat, auteur de BD qui met la dernière main à sa saga politico-historique parcourue à la fois par les révoltes du XXe siècle commençant et les héroïnes qu’il a toujours su dessiner.

Dans le MDL c’est à Eva Baltasar qu’Ariane Singer s’intéresse. Auteure de poèmes elle s’est tournée vers le roman sur l’injonction de sa thérapeute qui lui demande de rédiger sa biographie ; à cette occasion elle s’aperçoit qu’elle aime mentir sur les détails et se découvre un goût véritable pour le roman.

A la semaine prochaine !

Index des auteurs cités dans les suppléments littéraires de cette semaine (cliquer ici pour télécharger)