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Une semaine sans véritable pression, dans l’attente des premiers prix littéraires. On en profite à droite et à gauche pour aller vers des auteurs au long cours, Céline qui revient en compagnie de Maurice Garçon, François Cheng qui prend sa place dans le paysage poétique français, mais aussi la discrète Rachel Cusk. Et alors, que dire des évangélistes !
Teaser Audio de la semaine - Les écrivains russes
LES UNES
Céline, Ici Londres ! Alain Nicolas dans l’Humanité s’intéresse à ce nouvel opus sorti de la malle de Céline ; il ne s’agit plus de comparer, de lire dans une œuvre une autre, à venir, mais de découvrir un roman inédit : « Londres, loin d’être une fiction nihiliste, se présente comme un roman d’apprentissage moins désabusé qu’on croirait, et il ouvre des perspectives singulières sur l’œuvre célinienne. » La description des bas-fonds de Londres est saisissante ; elle mêle les clichés de l’aventure interlope assez en vogue depuis la Belle époque (souteneurs et mauvais garçons en tous genres) et une confiance dans l’humain représenté ici par un médecin juif que Céline décrit en puisant dans la gamme habituelle de sa rhétorique ignominieuse tout en lui reconnaissant des qualités humaines au-dessus de la moyenne une attitude « qui n’a pas fini d’interroger quand on sait que, deux ans plus tard, il écrira les pamphlets antisémites qu’on connaît » L’explication relève sans doute davantage de la psychologie que de la littérature.
Rachel Cusk ou une écrivaine en une du Libé des livres samedi. Un roman, nous dit Thomas Stélandre qui pourrait passer pour un vaudeville, avec différents couples qui se rencontrent dans une résidence secondaire, des initiales pour les deux personnages principaux, M, la narratrice, et L le peintre qu’elle a invité. Mais le texte va plus loin, M, par exemple nous dit Rachel Cusk est « quelque chose de plus éternel dans le féminin. Une sorte d’itinérance de l’esprit, sans cesse en train de se demander : est-ce tout ? Qu’est-ce que cela veut dire ? Est-ce que je ne peux pas être davantage, en faire davantage ? ». Désormais parisienne, l’auteure se dit à la fois attachée aux lieux du récits et à l’âge, le sien à travers sa conciliation avec le récit.
« J’ai voulu montrer que la mise par écrit de l’enseignement et de la brève vie publique d’un rabbi galiléen du premier siècle de notre Ere est devenue une formidable question de langage. » C’est Frédéric Boyer qui le dit et Elodie Maurot de Livres et idées qui le souligne. Après un rappel du travail déjà accompli par l’auteur dans la traduction et la direction d’édition dans ce domaine, la critique loue son texte qui « se déploie ici comme un poème qui est aussi une longue épopée. Il est scandé par des retours à la ligne qui le rythment, le façonnent, cadrent des scènes visuelles, presque cinématographiques ». Des choix de vocabulaire sont également présents : « confiance » » pour foi, « manque » pour péché, « la vie à jamais » pour la vie éternelle. Gageons (sans risque) que ce travail aura « ses thuriféraires et ses détracteurs ».
« La feuille de température d’une société brutale et paniquée qui n’est pas sans rappeler la nôtre. » Nous dit Philippe Lançon avant d’ajouter « l’émotion de l’auteur est son thermomètre » ; et cet auteur c’est Maurice Garçon, avocat mondain dont le journal couvre le XXe siècle dans ce qu’il a de plus âpre, de 1912 à 1967. Selon la formule du critique c’est un « notable récalcitrant » qui commente, et sa carrière, et son siècle à l’acide. Il assiste à l’exécution d’un de ses clients mais regarde surtout les spectateurs, entre inhumanité et bêtise brute. Son art le plus tranchant est celui du portrait, celui de Laval par exemple dont il souligne à la fois la saleté corporelle et l’arrivisme efficace ou celui de Blum « meneur d’homme redoutable, juif destructeur qui fusillerait son père s’il le croyait nécessaire à ses folles imaginations » parce que Garçon ce sont aussi des « préjugés, … nombreux et gratinés » nous prévient Lançon.
La une du Monde (après celle de La Croix) pour Revolusi, le curieux livre de David Van Reybrouck, curieux auteur, par ailleurs « historien, romancier, essayiste, auteur de théâtre, poète et activiste du climat. » nous dit Florence Noiville. Ce livre retrace la guerre de libération du peuple indonésien dont la réussite sera entérinée par la conférence de Bandung dont nous avons oublié le nom mais qui marque cependant le début du « non-alignement » et, rappelle la critique : « la décolonisation, la lutte anti- impérialiste en Amérique latine, le mouvement des droits civiques aux Etats-Unis, accélérant même, en réaction, la formation de la future Communauté européenne. » L’auteur a recueilli, durant un long travail d’investigation, les souvenirs des derniers survivants « Ces voix de Java, des Moluques, de Sumatra…, toutes ces paroles qui n’avaient guère dépassé les frontières d’un village ou d’un cercle familial, on ne les avait jamais entendus en Occident. » C’est la une mais le cahier documentaire porte sur les textes me-too.
François Cheng occupe à lui tout seul la une et le cahier central du Figlitt ; comme le rappelle Etienne de Montety il est « le plus célèbre et le plus méconnu des poètes français d’aujourd’hui ». Né en Chine, il a choisi de rester à Paris tandis que sa famille prenait la route de l’exil américain et s’est donné une langue plutôt qu’un pays. Deux sources et deux lectures se font concurrence dans l’appréhension de son œuvre, l’aspect orphique et l’aspect chrétien. Pour la première Jean-Pierre Lemaire, lui-même poète insiste sur son goût pour les formes brèves et conclut : « il occupe une place singulière comme passeur entre les deux cultures, chinoise et française et, surtout, peut-être, comme représentant de cette « voie orphique » aujourd’hui délaissée au profit d’une poésie de la « présence », de l’ici et maintenant. »
Dans le pêle-mêle
Anne Serre a toujours eu une écriture particulière que résume ainsi Muriel Steinmetz : « des pistes suivies puis délaissées, une ou deux sorties de route et de menues énigmes qui tiennent en deux ou trois lignse dans un coin » Francine de Martinoir tente pour La Croix de s’orienter dans ce labyrinthe. Pas facile entre personnages et entités. Nastassja Martin est une ethnologue qui attire l’attention sur les peuples du nord, entre Alaska et Kamtchatka ou entre Gwich’in et Even, peuples premiers qui ont cherché des solutions face à leur mise en péril par les sociétés dominantes qu’ils subissent. Elle annonce une nouvelle anthropologie dans « un style très particulier d’écriture, opposé à toute hiérarchie entre recherche et littérature. »
Portraits/Entretiens
Entretien dans le MDL avec Frédéric Marty qui a mis en chantier l’édition des œuvres de Louise Dupin, la féministe de 1750. Et, en dernière page, avec Nastassja Martin, anthropologue, voir plus haut. Deux rencontres dans le LibélS : Rachel Cusk, écrivaine anglaise peu connue et Jenny Erpenbeck écrivaine allemande de notoriété plus affirmée.
Index des auteurs cités dans les suppléments littéraires de cette semaine (cliquer ici pour télécharger)
Libération | |||
Titre | Auteur | Editeur | N° Page |
Samedi | |||
La Dépendance | Rachel Cusk | Gallimard | 34&35 |
Dernière nuit à Soho | Fiona Mozley | Joëlle Losfeld | 36 |
Je vais, tu vas, ils vont | Jenny Erpenbeck | Fayard | 36&37 |
Jusque dans la terre | Sue Rainsford | Aux Forges de Vulcain | 37 |
Un chien à ma table | Claudie Hunzinger | Grasset | 38 |
Débrouille-toi avec ton violeur | Infernus Johannes | L’Olivier | 38 |
Capitaine Vertu | Lucie Taïeb | L’Ogre | 39 |
Patte blanche | Kinga Wyrzykowska | Seuil | 39 |
Crier son nom | Alesso Forgione | Denoël | 39 |
Philosophie féline | John Gray | Gaïa | 39 |
L’avenir d’une désillusion | Henri de Monvallier | Le Passeur | 39 |
Deux mille mots pour dire le monde | Henriette Walter | Bouquins | 39 |
Trafalgar | Benito Perez Galdos | Zoé | 39 |
Chien 51 | Laurent Gaudé | Actes Sud | 39 |
Jeudi | |||
Journal 1912-1939 | Maurice Garçon | Les Belles Lettres/Fayard | 24/25 |
Mes fantômes et moi | Gabriel Byrne | Sabine Wespieser | 26 |
Ethnographie des mondes à venir | Descola Pignocchi | Seuil « Anthropocène » | 27 |
Corps flottants | Jane Sautières | Verticales | 27 |
Le Figaro | |||
Titre | Auteur | Editeur | N° Page |
La traversée de Bondoufle | Jean Rolin | P.O.L | 1 |
La main sur le cœur | Yves Harté | Le Cherche midi | 2 |
Le cœur ne cède pas | Grégoire Bouillier | Flammarion | 2 |
Roman fleuve | Philibert Humm | Eds des Equateurs | 2 |
Toute une moitié du monde | Alice Zeniter | Flammarion | 3 |
L’invention du diable | Hubert Haddad | Zulma | 3 |
Une longue route pour m’unir au chant français | François Cheng | Albin Michel | 4 |
Cheng. « Cahiers de l’Herne » | Olivia Mauriac dir. | Eds de l’Herne | 4 |
présentation de l’œuvre de Cheng. | 5 | ||
Nostalgie, histoire d’une émotion mortelle | Thomas Dodman | Seuil | 6 |
24 heures de la vie d’un restaurant | David Michon | PUF | 6 |
Le ghetto de Minsk | Hersh Smolar | Payot | 6 |
Mon cher mari | Rumena Buzarovska | Gallimard | 7 |
Où es-tu monde admirable? | Sally Rooney | Eds de L’Olivier | 7 |
Actrice | Anne Enright | Actes Sud | 7 |
Londres | L-F Céline | Gallimard | 8 |
Louis-Ferdinand Céline | Le trésor retrouvé | Allia | 8 |
La Croix | |||
Titre | Auteur | Editeur | N° Page |
Evangiles | Frédéric Boyer | Gallimard | 11 |
Notre si chère vieille dame auteur | Anne Serre | Mercure de France | 12 |
Deux secondes d’air qui brûle | Diaty Diallo | Seuil | 12 |
Il n’y a pas de Ajar | Delphine Horvileur | Grasset | 13 |
Shirley et Vilette | Charlotte Brontë | La Pléiade | 13 |
Le président se tait | Pauline Dreyfus | Grasset | 14 |
Argonne | Stéphane Emond | La Table ronde | 14 |
Hiver 1812. Retraite de Russie | Michel Bernard | Mercure de France | 15 |
A l’Est des rêve. Réponses even aux crises systémiques | Nastassja Marin | La Découverte/Les empêcheurs de penser en rond | 15 |
La synodalité | Agnès Desmazières | Les Béatitudes | 16 |
Synode? Vous avez dit synode? | Benoît-Dominique de La Soujeole | Artège | 16 |
Vis monastique de la synodalité | Bulletin de l’Alliance inter – | monastères | 16 |
« L’Eglise synodale »CommunioRevue catholique internationale | 17 | ||
Je n’habitais pas mon visage | Mathieu Farcy | Loco | 18 |
Proust et les arts | Thierry Laget | Hazan | 18 |
S’enforester | Mantovani / Morizot | D’une rive à l’autre | 18 |
Mies | Augustin Ferrer Casas | Nouveau Monde Graphic | 18 |
Constantin Brancusi | Doïna Lemny | Gourcuff Gradenigo | 18 |
Le Monde | |||
Titre | Auteur | Editeur | N° Page |
Revolusi. L’indonésie et la naissance du monde moderne | David Van Reybrouck | Actes Sud | 1 |
Des femmes. | Louise Dupin | Classique Granier | 2 |
Le droit au sexe. Le féminisme au XXIe siècle | Amia Srivinasan | PUF | 2 |
Tenir sa langue. Le langage lieu de lutte féministe | Julie Abbou | Les Pérégrines | 3 |
Le prénom a été modifié | Perrine Le Querrec | La Contre Allée | 3 |
A l’amie des sombres temps. Lettres à V Woolf | Geneviève Brisac | Nil | 3 |
Comment la modernité ostracisa les femmes | Pascal Picq | Odile Jacob | 3 |
Le champ des cris | Adrien Genoudet | Seuil | 4 |
Le feu du milieu | Touhfat Mouhtare | Le Bruit du monde | 4 |
Bibiche | Raozy Pellerin | Plon | 4 |
Blanc | Sylvain Tesson | Gallimard | 4 |
Le poids des choses | Marianne Fritz | Le Quartanier | 5 |
Napalm dans le cœur | Pol Guasch | La Croisée | 5 |
Une rétrospective | Juan gabriel Vasquez | Seuil | 6 |
Ma vie avec Stravinsky | Jean-Yves Larroutourou | Gallimard | 6 |
Dans un royaume lointain | Amina RichardStock | Stock | 6 |
L’Obscur | John Mac Gahern | Sabine Wespieser | 6 |
Penser le mal | Susan Neiman | Premier Parallèle | 7 |
Tombeaux. Autobiographie de ma famille | Annette Wieviorka | Seuil « Fiction & Cie » | 7 |
Le rêve brisé de Charles Quint | Guillaume Frantzwa | Perrin | 7 |
D’Erwing à Goffman. L’œuvre performée, | Yves Winkin | MkF « Les essais médiatiques » | 7 |
Faits divers et vies déviantes | Roy Pinker | CNRS Editions | 7 |
Oury, donc | Pierre Delion | Questions de psychiatrie | 7 |
Toute une moitié du monde | Alice Zeniter | Flammarion | 8 |
Cahiers de formation | Michel Serres | Le Pommier | 8 |
Contes de minuit et autre nouvelles | Emile Verhaeren | Espace Nord | 8 |
Petit eloge de la Belgique | Grégoire Polet | Folio | 8 |
Le roman de Tyl Ulespiègle | Daniel Kehlmann | Ahholder – Babel | 8 |
Le lieutenant Burda | Ferdinand Von Saar | Bartillat | 9 |
Chronique | Pedinielly / Ancery | Flammarion/Retro news | 9 |
Reportages dans « Detective » | Joseph kessel | Arthaud | 9 |
Le goût de l’adieu | Alexandre Maujean | Mercure de France | 9 |
A l’Est des rêve. Reponses even aux crises systémique | Nastassja Martin | La Découverte/Les empêcheurs de penser en rond | 10 |
L’humanité | |||
Titre | Editeur | N° Page | |
Londres | L-F Céline | Gallimard | 17-18 |
Notre si chère vieille dame auteur | Anne Serre | Mercure de France | 18 |
La vie clandestine | Monica Sabolo | Gallimard | 19 |
Jean-Luc et Jean Claude | Laurence Potte_Bonneville | Verdier | 19 |
Vivre vite | Brigitte Giraud | Flammarion | 19 |
La Place | Annie Ernaux | Gallimard | 20 |
Sur les sociétés précapitalistes | Marx et Engels | Les Editions sociales | 20 |
Une identité française | Rosemonde Cathala | Arcane 17 | 20 |
Notre-Dame de Paris | Dir Philippe Dillmann | Le Cherche midi | 21 |
L’épicerie du monde | Dir Singaravélou ; Venayre | Fayard | 21 |
Traité d’onanirisme à usage de ceux qui ont perdu la mémoire | Jehan van Langhenhoven | Douros | 21 |
Hommage Guattari | 21 | ||
Clara Magazine | féminisme | 21 |