LES UNES

L’auteur vedette de cette actualité c’est Mathieu Belezi que l’on retrouve avant tout en une de l’Huma cette semaine, pour un entretien dans lequel il commente sa volonté d’écrire sur l’Algérie : un « travail, qui était pourtant, et je tiens à le préciser, un travail sur la langue, son rythme emporté, démesuré, ubuesque ». Pourquoi le préciser ? Parce que Mathieu Belezi écrit depuis longtemps sur l’Algérie mais jusqu’ici ses œuvres ont plutôt été mises sous le boisseau.

Paradoxalement ce 4ème roman « devrait plutôt être – confie-t-il à Muriel Steinmetz- considéré comme une sorte d’ouverture à cette aventure coloniale de plus d’un siècle (…) Vous voyez, c’est rétrospectivement que les œuvres peuvent s’emboîter les unes dans les autres et trouver leur place » Ici, il semble bien que l’écho donné à l’œuvre coïncide avec la capacité de l’écrivain à s’en saisir.

Mathieu Belezi est présent également en ouverture du panorama qu’Alexandra Schwartzbrod consacre ce jeudi aux variations sur l’Algérie. En passant en revue les cinq romans de la rentrée qui traitent la question, elle en restitue la plupart des aspects. Mathieu Belezi donc, et les aventures croisées de son héroïne qui perd toute illusion sur la terre promise algérienne et de ce jeune soldat qui, heurté par la violence, y cède d’autant plus fortement.

Mais aussi d’autres auteurs, Emmanuel Ruben, qui cherche la présence de ses « ancêtres maternels juifs installés en Algérie dès 1836 » et Yasmina Khadra dont le héros Yacine souffre, de la première guerre mondiale aux guerres civiles, comme une sorte de bouc émissaire total qui « survit à toutes les tragédies, affronte toutes les tempêtes » Mais encore Abdelkader Djemaï et Kaouter Adimi qui insistent sur l’enfance, l’amour et le destin familial qui se mêle à la « grande histoire ».

Kaouther Adimi fait également l’ouverture de Livres et Idées, le cahier livres de La Croix, avec son roman qui retrace les aventures d’une famille dans un « tableau sensible et puissant, nous dit Sabine Audrerie, de son pays au long du XXe siècle » L’histoire d’amour centrale repose sur « une fidélité inamovible malgré la distance, chacun acceptant son rôle, chacun offrant pour l’autre le sacrifice de ses renoncements ». Le vent mauvais c’est celui de la littérature lorsqu’elle vole les mots des autres.

1962, c’est l’année des accords d’Evian mais aussi celle de la mort de Jean-René Huguenin dont Bouquins sort les oeuvres complètes nous dit le Figaro littéraire. Pour ce supplément c’est Huguenin le feu-follet, un roman au Seuil, La côte sauvage, des articles à la Table ronde sans être un hussard pour autant, la co-fondation de Tel Quel dont il se fera exclure et une disparition précoce à l‘âge de 26 ans. Christian Authier salue le travail de Bouquins et du préfacier, Michka Assayas en particulier.

Un rappel, Gracq disait « La voix de Huguenin, venue de très loin continuera à résonner bien au-delà de son époque » Souvent opposé au monde moderne il n’est pas réactionnaire pour autant, juste engagé à fond dans la littérature. Le cahier se complète d’un article consacré à la publication de Génération hussards de Marc Dambre, de la Sorbonne, et qui, nous dit Sébastien Lapaque, « s’intéresse depuis quatre décennies aux liens entre style, pensée et imagination, avec un goût assuré pour les écrivains de droite » Éternelle actualité au Figlitt.

« Plonger dans un milieu social et sensuel où le plaisir tient lieu de liquide amniotique (…) C’était une sorte de plaisir en soi, continu, avec différents partenaires, donc pas forcément pris dans les affres du rapport amoureux qui complique parfois les choses. » C’est le retour de Catherine Millet et, bien entendu des écrits consacrés à l’art et la vie sexuelle entremêlés. Avec Jean Birnbaum du Monde des Livres, elle s’interroge en une, de façon sereine, sur sa vie qui reste malgré tout liée à l’enfance, la sienne, qu’elle n’a jamais véritablement quittée. Elle fait partie des 5 nouveaux auteurs présentés par le journal pour son prix… Palmarès la semaine prochaine.

Pour finir, un LibéL ce jeudi qui choisit avec Virginie Bloch-Lainé de mettre en avant Paul Audi, philosophe français d’origine libanaise qui s’interroge sur, et refuse, l’assignation à une identité nationale. « La France d’Audi, c’est l’insolente liberté, l’indocilité, la France libre. » Mais s’il doit choisir, il préfère la France pour des raisons de création artistique « En sorte qu’il m’a été donné de prétendre à quelque chose, c’est à être justement le prétendant de la Littérature, le sujet qui espère de toutes ses forces obtenir les faveurs de cette reine. »

Dans le pêle-mêle

Deux papiers pour un roman sur deux adolescentes qui se réfugient dans une « campagne » pour y soigner leurs douleurs et celle, toute particulière d’être une adolescente.

Un premier roman réédité de Mikella Nicol, autrice québécoise. Deux également pour Yves Ravey « un penchant prononcé des personnages pour la médiocrité et des phrases dont la transparence ne rend pas moins opaques les comportements des protagonistes. » nous dit Raphaëlle Leyris du MDL : soit un couple sur la route des vacances qui se fourvoie dans de petits chemins, heurte « quelque chose » et poursuit sa route. « Portrait d’un salaud intranquille qui accuse la faute à pas de chance de lui gâcher se vacances » complète J-C Raspiengeas de La Croix.

Dans le même La Croix, Emmanuelle Giuliani nous dit tout le bien qu’elle pense de Je suis Jésus, un récit à la première personne de la vie du Christ « traversé d’émotions contraires et violentes, de douleurs inexpliquées, de bouffées dépressives et de questions sans fin. » Il raconte sa vie de façon rétrospective nous dit la critique. Florence Bouchy du MDL complète en soulignant que l’intrigue de Giosué Calaciura n’est pas gratuite « les signes annonciateurs de sa destinée hors norme peuvent s’intégrer à une psychologie familiale bien identifiée »

Portraits/Entretiens

John Banville Figlitt, Mathieu Belezi entretien dans l’Huma et Guillame le Touze dans la page rencontre du MDL ainsi que Catherine Millet dans le même numéro.

Index des articles parus dans la presse de cette semaine (cliquer pour télécharger)