Si l’actualité continue d’imposer son rythme, cette semaine, nos suppléments s’intéressent à des auteurs moins suivis et qui proposent des échappées vers des terres, des Pyrénées à Cuba. Pour le monde entier, voir Descola.
La chronique audio de la semaine
Les Unes.
Pour La Croix cette semaine, c’est la rentrée des idées : Sabine Gignoux nous fait partager sa lecture du livre de Philippe Descola, consacré une nouvelle fois aux quatre grandes ontologies humaines (Animisme, totémisme, analogisme et naturalisme) du point de vue des productions artistiques. La critique note, cette fois, comme pour d’autres articles la complexité de l’analogisme à la croisée des cultures. Parfois très touffu ou, au contraire dépouillé, marqué « par un vide central tels les paysages de montagne et d’eau en Chine », le concept semble difficile à saisir. Quoi qu’il en soit, l’ouvrage offre une approche à la fois délicate et complète des représentations humaines.
Côté idées mais côté amitié également, le LibéL de ce jeudi rend compte du livre de François Dosse consacré aux amitiés entre philosophes. Avec cet ouvrage, François Dosse interroge les relations amicales des Sartre, Aron, Deleuze, Guattari ou Foucaud. Amitiés, c’est-à-dire proximités, mais aussi désenchantements, brouille entre Castoriadis et Lefort par exemple autant sur le terrain des idées que des égos reptiliens luttant pour la possession des mêmes femmes. Les amitiés ne sont pas par ailleurs uniques ; Deleuze restera ami toute sa vie avec Guattari mais aussi avec Foucaud dont il se rapproche façon Montaigne-La Boétie : « Il n’y avait jamais besoin de parler avec lui. On n’a jamais parlé que de choses qui nous faisaient rire. » Peut-être après tout, là aussi faut-il être deux.
Samedi dans l’autre LibéL c’était la semaine de Kazuo Ishiguro, lequel avait déjà eu droit à la une du MDL le jeudi. Son roman consacré à la relation entre une androïde, Klara et une adolescente malade, Josie, a séduit une partie de la critique. Frédérique Roussel en fait partie, qui souligne les qualités du livre et notamment la vie (?) du robot social, sa capacité à observer, notamment, pas très éloignée de celle de l’écrivain. : « Elle tente de décrypter les raisons et les sentiments derrière les faits et gestes, les paroles des humains ». Ces derniers, et la mère de Josie en particulier, ne sont pas épargnés par l’auteur : « On peut y voir l’idée sous-jacente que les intelligences artificielles pourraient un jour totalement remplacer des personnes aimées disparues. » souligne la critique. Le robot prendrait le relai des parents dans la lutte contre la maladie ? Ce livre conçu à l’origine pour le jeune public montre à quel point ce type d’interrogation dépasse les classes d’âge.
Après la SF, le fantastique avec Mariana Enriquez et son roman hanté par les personnages de mediums et en particulier celui d’un petit garçon, « medium en bouton » qui est-il ? « l’enfant Gaspar, enjeu de toutes les convoitises et objet de tous les soins, est au cœur du roman. Sa mère est décédée, il est à la charge d’un père promis à la mort et qui refuse d’en faire un pur instrument du culte » nous dit François Angelier. Lequel en spécialiste du mauvais genre nous dresse un portrait de l’autrice qui séduit « bercée enfant par les contes guaranis narrés par son aïeule, puis nourrie, ado, par les classiques de l’horreur gothique, elle puise à pleine plume dans un patrimoine horrifique qu’elle maîtrise pleinement. » Le fantastique argentin se porte bien.
Cuba dans l’Huma c’est assez naturel, et pourtant le retour qu’effectue Leonardo Padura sur l’existence que l’on peut mener à dans l’île est envisagée davantage sous l’angle du rapport entre les individus qu’au nom du seul engagement politique. Son roman raconte l’histoire d’une bande d’amis, soudée, fière d’être cubaine jusqu’à l’effondrement du bloc soviétique, éclatée et hagarde après. Si beaucoup sont partis, l’auteur est resté et a continué d’écrire au milieu d’un pays qui manquait de tout mais où tout le monde faisait des miracles et surtout les femmes qui « ont multiplié les pains et les poissons sans avoir un seul morceau de pain ni de poisson. » Aujourd’hui reconnaît l’auteur, « Le temps est venu d’avoir l’intelligence de prendre des décisions, d’imaginer une projection raisonnable et de raisonner pour révolutionner non seulement l’économie mais aussi la politique et la société cubaine. » Le numéro de l’Huma en profite pour faire le point sur les lettres hispaniques.
Ce n’est pas la première fois que le Figaro littéraire s’intéresse au terroir en littérature : cette fois c’est à travers quatre auteurs ; Eric Fottorino qui ne se montre guère optimiste sur le sort des paysans français malgré son constat : « il y a une vérité dans l’ordre éternel des champs » ; Corinne Royer qui, avec un héros au patronyme suffisamment général pour servir d’exemple « Jacques Bonhomme » livre un récit encore plus noir au sujet de la condition agricole. Comme le relève Alice Develey à son sujet « La peur c’est quand on a encore de l’espoir. Il avance comme Meursault au soleil alors que, devenant étranger, il ne peut plus reculer. » Et deux romans d’auteurs qui savent éviter les clichés, Edouard Bureau parce qu’il possède un style à la Ramuz d’après Alexandre Fillon, le second, Matthieu Falcone en reprenant le thème des années soixante dix de l’affrontement entre néo-ruraux et personnages du cru à tous points de vue comme le souligne Sébastien Lapaque.
Dans le pêle-mêle Avec Livres et idées, Sorj Chalandon boucle son périple ; Guillaume Goubert relève la déchirure centrale de l’œuvre : « Le plus grave, c’est le fait que le père refuse d’expliquer quoi que ce soit à son fils, se murant continûment dans de nouvelles affabulations . (…) soulignant ce que peut être la douleur d’un enfant qui cherche à se libérer et à libérer son père de l’emprise du mensonge. » Dans la pourquoi ça marche de LibéL, Claire Devarrieux souligne le côté fascinant du salaud qui croise la route de l’enfant, devenu journaliste et contribue en quelque sorte à sa vocation. Après les brassées de fleurs de la rentrée complétées d’un très court compliment dans La Croix de cette semaine « roman formidablement construit , possède un souffle puissant » Anne Berest va devoir se contenter d’épines dans la chronique de sa consoeur Camille Laurens du MDL « j’aimerais dire qu’à défaut de littérature Anne Berest est douée pour le cinéma » Ce sera non, hélas. La critique lui reproche essentiellement sa naïveté (feinte ?) face à la déportation, comme s’il n’y avait eu aucun écrivain avant elle : « On croirait parfois lire « La Shoah pour les nuls », bref un « llivre sans ombre ni épaisseur, à rebours de l’histoire qu’il voudrait honorer ». Sino, dans le même MDL le débat entre un Antoine et un Alain sur les fins de la littérature : on y retrouve quelques dadas, le pessimiste Alain « – Je dis simplement que la vision littéraire ne façonne plus les âmes » et l’optimiste Antoine « – Mon expérience (…) m’a confirmé dans la conviction qu’il existe une demande de littérature, voilà pourquoi je mets en garde contre le provincialisme parisien qui vous fixe sur les faits divers intellectuels, ce que Voltaire nommait la « crème fouettée » (…) Alain – « Provincialisme ? Ce que je perçois, » tout au contraire, c’est une américanisation rapide de la France. » Dialogue entre le critique et le professeur ?
Index des auteurs cités dans les suppléments littéraires de cette semaine (cliquer ici pour télécharger)
L’humanité | |||
Auteur | Editions | Titre | Page |
Leonardo Padura | Métaillié | Poussières dans le vent | 19-20 |
Pablo Martin Sanchez | Zulma | L’homme qui s’appelait comme moi | 20 |
David Fauquemberg | La Croisée | Hades, Argentine | 20 |
Amélie Nothomb | Albin Michel | Premier sang | 20 |
Franck Delorieux | Gallimard | Quercus – Le saminaire des nuits | 21 |
Jean-François Bert | Labor et Fides | Le courage de comparer | 21 |
Frédéric Gros | Albin Michel | La honte est un sentiment révolutionnaire 21 | |
Corinne Pelluchon | Rivages Poche | Manifeste animaliste | 21 |
Michel Kreutzer | Le Pommier | Folies animales. | 21 |
Libération | |||
Auteur | Editions | Titre | Page |
JEUDI | |||
François Dose | Odile Jacob | Amitiés Philosophiques | 26 |
Olivier Grenouilleau | Gallimard | Christianisme et esclavage | 27 |
Tristan Gaston-Breton | Tallandier | La saga des Rockfeller | 27 |
SAMEDI | |||
Kazuo Ishiguro | Gallimard | Klara et le soleil | 34&35 |
Etienne Kern | Gallimard | Les envolés | 36 |
Frédéric Paulin | Agullo | La nuit tombée sur nos âmes | 37 |
Emmanuelle Lambert | Stock | Le garçon de mon père | 37 |
Natlia Garcia Freire | Christian Bourgois | Mortepeau | 38 |
William Boyle | Gallmeister | La cité des marges | 38 |
Tola Rotimi Abraham | Autrement | Black Sunday | 39 |
Andrew Krivak | Globe | L’ours | 39 |
Claire Conruyt | Plon | Mourir au monde | 39 |
Henri de montvallier | Le Passeur | Le portefeuille des philosophes | 39 |
Gianrico Carofiglio | Les Arènes | De la gentillesse et du courage | 39 |
Philippe Besson | Julliard | Le dernier enfant | 40 |
Sorj Chalandon | Grasset | Enfant de salaud | 41 |
Kevin Lambert | Le Nouvel Attila | Tu aimeras ce que tu as tué | 41 |
Le Figaro | |||
Auteur | Editions | Titre | Page |
Patrice Franceschi | Grasset | S’il n’en reste qu’une | 1 |
Eric Fottorino | Gallimard | Mohican | 2 |
Matthieu Falcone | Albin Michel | Campagne | 2 |
Corinne Royer | Actes Sud | Pleine Terre | 3 |
Edouard Bureau | Le Cherche Midi | La grande vallée | 3 |
Kawai Strong Washburn | Gallimard | Au temps des requins et des sauveurs | 4 |
Rachel Kushner | Stock | Les routiers sont sympas | 4 |
Leonardo Padura | Métaillié | Poussières dans le vent | 4 |
page 5 pub | page 5 pub | 5 | |
Marie-Françoise Baslez | Salvador | L’église à la maison | 6 |
Loïc Chollet | Vendémiaire | Dernières croisades | 6 |
Zrinka Stahuljak | Seuil | Les fixeurs au Moyen Age | 6 |
Antoine Dolle | Robert Laffont | Six pieds sur terre | 7 |
Vives Quenehen | Casterman | Corto Maltese Océan noir | 7 |
Jean-Christophe Grangé | Albin Maichel | Les promesses | 8 |
La Croix | |||
Auteur | Editions | Titre | Page |
Philippe Descola | Seuil | Les Formes du visible | 11 |
Sorj Chalandon | Grasset | Enfant de salaud | |
Christophe Boltanski | Stock | Les Vies de Jacob | |
Marc Dugain | Gallimard | La Volonté | |
Christine Angot | Flammarion | Le Voyage dans l’Est | |
Anne Berest | Grasset | La Carte postale | |
Rose Maria Unda Souki | Zulma, | Ce que Frida m’a donné | |
Ta-Nehisi Coates | Fayard | La Danse de l’eau | |
Frédéric Gros | Albin Michel | La honte est un sentiment révolutionnaire | |
Pierre Rosanvallon | Seuil | Les épreuves de la vie. Comprendre autrement les Français | |
Odile Robert | Éditions du Carmel | L’Église pèlerine. Histoire de la spiritualité chrétienne | |
Bernard Marliangeas | Cerf | Sortir de la violence ? Le mal, la faute, le pardon | |
Bernard Minvielle | Cerf | Pourquoi la méditation ne suffit pas | |
Christoph Theobald | Cerf, Collection Cogitatio Fidei | Le Courage de penser l’avenir. | |
Catherine Chalier | Bayard | Comme une clarté furtive | |
Marceline Loridan-Ivens | Les Arènes | C’était génial de vivre | |
Le Monde | |||
Auteur | Editions | Titre | Page |
Mariana Enriquez | Le Sous-sol | Notre part de nuit | 1 |
Christophe Boltanski | Stock | Les vies de Jacob | 3 |
Pierre Darkanian | Anne Carrière | Le rapport chinois | 4 |
Dan Nisand | Les Avrils | Les garçons de la cité-jardin | 4 |
Salomé Kiner | Christian Bourgois | Grande couronne | 4 |
Rosa Montero | Métaillié | La bonne chance | 5 |
Karl Ove Knausgard | Denoël | En automne | 5 |
Hwang Jungeun | Zoé | Je vais ainsi | 5 |
Antoine Compagnon | Equateurs | La vie derrière soi | 6&7 |
Alain Finkielkraut | Stock | L’après-littérature | 6&7 |
Jean-Daniel Baldassat | Calmann-Lévy | Une folie de rêves | 8 |
Tom Lanoye | Le castor astral | La langue de ma mère | 8 |
Juhani Karila | La Peuplade | La pêche au petit brochet | 8 |
Sandrine Girard | Calmann-Lévy | Hors de toi | 8 |
Agnés Desarthe | L’Olivier | L’éternel fiancé | 9 |
Anne Berest | Grasset | La carte postale | 10 |
Eva von Redecker | Payot | Révolution pour la vie | 10 |
Michel Layaz | Zoé | Louis Soutter probablement | 10 |
Edmondo de Amicis | Allia | Dans le jardin de la folie | 10 |
Stefan Zweig | Payot | Freud. La guérison par l’esprit | 10 |
Alain Testart | CNRS éditions | Principes de sociologie | 11 |
Hervé Mazurel | La Découverte | L’inconscient ou l’oubli de l’histoire … | 11 |
Susan neiman | Première Parallèle | Grandir. Eloge de l’âge adulte à … | 11 |
Thomas B.Reverdy | Flammarion | Climax | 12 |