Cette semaine c’est un peu retour vers le futur général dans vos suppléments livres, avec les poètes latins, les inédits d’auteurs disparus des éditeurs de poésie à l’honneur 34 ans après la cessation de leur activité…et Pierre Dumayet.

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Les unes

Hommage à la critique de la critique.

Samedi LibéL nous invitait à rencontrer Robert Bober qui écrit à Pierre Dumayet son complice (et son aîné) de l’époque des émissions littéraires et documentaires à la télévision : « ce livre-ci, souligne Claire Devarrieux, n’est pas un roman, mais ce n’est pas non plus une autobiographie. Bober ouvre son album, ses tiroirs, sa mémoire ».

Ce livre s’intitule Par instant la vie n’est pas sûre. Bober y parle de ses débuts dans la confection, de littérature essentiellement, de ses rapports avec André Schwartz-Bart de certains épisodes des films qu’il réalise avec Dumayet, bref d’une époque révolue mais dont les idées palpitent encore dans la nôtre, même si c’est assez faiblement. Un article remarquable de Claire Devarrieux.

En ce moment sont à l’affiche :

Simone de Beauvoir, Paul Léautaud, Julien Gracq, Jean Cocteau, Fernando Pessoa, Paul Valéry, Alexandre Dumas, Stefan Zweig, Joseph Roth… c’est en substance ce que nous dit le dossier du Figaro littéraire.

Mohamed Aïssaoui y insiste, les inédits envahissent l’édition, certains parce qu’inépuisables et dans le goût de l’époque, comme ceux de Zweig, d’autres parce qu’ils ressurgissent d’un passé dans lequel ils n’avaient pas leur place comme Les inséparables de Simone de Beauvoir qui paraît à l’Herne et raconte en version romancée son amour pour sa camarade de classe Elisabeth Lacoin. Elle en rapporte les bouleversements intimes sans pour autant en faire un roman saphique.

C’est tout le contraire avec le journal particulier de Jouhandeau dont Isabelle Gallimard dit l’intérêt, excitation de publier un inédit censuré par son exécutrice testamentaire. ECOUTER LA CHRONIQUE

Les éditeurs de poésie, Orange export LTD, sont en une de l’Huma :

on ne devine pas forcément la poésie derrière ce titre et pourtant Alain Nicolas nous rappelle qu’il s’agit là d’une expérience qui vit se croiser des noms aujourd’hui prestigieux « Y collaboreront des acteurs d’approches et d’horizons très différents, de Jacques Roubaud à Denis Roche, de Bernard Noël à Michel Deguy, de Dominique Grandmont à Olivier Cadiot et bien d’autres. La lecture du sommaire de ce volume, réédition de celui qu’Emmanuel Hocquard et Raquel avaient publié en 1986, lorsqu’ils décidèrent de mettre fin à l’aventure, donne le vertige à elle seule.»

Le fait de n’avoir jamais voulu céder à la tentation du cénacle ou de l’école leur a conféré moins de visibilité sans doute mais a contribué à protéger leur indépendance. Une expérience littéraire à découvrir sur 400p.

Et les poètes latins alors ?

La une de livres et idées (La Croix) pour le volume que la « Pléiade » consacre aux poètes de et influencés par la langue latine : « Célébration de la rencontre de la poésie et de la langue latine depuis le IIIe siècle avant Jésus-Christ, ce volume, doté des notices biographiques de plus de 180 auteurs, ravira les nostalgiques comme les amateurs du beau. »

Il ne s’agit pas d’une fascination d’arrière garde car, nous apprend Sabine Audrerie, on trouvera aussi dans les pages (1920 !) de ce volume, des textes d’auteurs influencés par cette poésie au point d’en composer eux-mêmes comme Rimbaud ou Baudelaire ou de donner des idées à bon nombre d’auteurs comme Péguy ou Claudel.

Ce jeudi dans LibéL, un article à propos d’un des livres forts de l’année consacré par Francesco Filippi à Mussolini.

Il y démonte les mythes notamment celui qui fournit le titre italien de son ouvrage : Mussolini a aussi fait de bonnes choses, ce qui donne en français ce titre un peu niais Y-a-t-il de bons dictateurs ? On voit bien que la première formule renvoie à une affirmation ce qui est un pas déjà franchi par rapport au déni de la forme interrogative.

L’entretien accordé par l’auteur à LibéL met en relief la négligence occidentale vis-à-vis du fascisme dont la mécanique de violence et de destruction est dissimulée par l’image qu’on a voulu donner d’un Mussolini ridicule et maladroit. La formule finale de l’entretien mené par Arnaud Valerin dit bien la légèreté avec laquelle on pense l’époque en Italie même : « Il n’a jamais été dit aux Italiens qu’ils avaient provoqué une guerre, tenté de la gagner, mais qu’ils l’avaient perdue. Puis, certains d’entre eux sont convaincu d’avoir fait match nul d’une certaine manière »

Enfin, le Monde des Livres réserve sa une au livre de Christophe Naudin

Journal d’un rescapé du Bataclan, pour en souligner à la fois le courage mais aussi, mais beaucoup, la nécessité de remettre en cause la gauche partisane qui ne sait pas se remettre en question.

Sauf que ce livre, rappelle Jean Birnbaum est publié par les éditions Libertalia, petite maison anarchiste ; courage de la remise en question donc ? Voire ! « Que se passera-t-il, cette fois ? Par miracle, le témoignage de Christophe Naudin provoquera-t-il, chez ses camarades, un débat loyal ? Ou bien, comme si souvent dans le passé, le rescapé sera-t-il banni comme renégat ? » interroge le critique. Pourquoi poser une question si c’est pour y répondre tout de suite par la négative ? Débat à suivre.

Dans le pêle-mêle

Jean Claude Lebrun dans sa chronique de l’Huma présente le livre d’Alice Ferney « la capacité d’enfanter sans sexualité, l’un des sujets brûlants au cœur de ce livre dense et profond, qui organise la rencontre de la complexité narrative et du questionnement philosophique. » tout en reconnaissant la capacité de l’auteur à ne pas tomber dans les travers simplistes de son époque.

S’il le dit (l’Intimité). Jean Rolin est dans l’Huma avec son Pont de Bezons qui fait ainsi carton plein des titres critiques, lesquels soulignent à l’unanimité le tour de force : évoquer un lieu de banlieue sans charme même s’il s’agit de répondre à l’injonction de Céline « Chanter Bezons, voici l’épreuve ».

C’est La Croix qui accueille cette fois, après le MDL la semaine dernière, les passagers de l’avion qu’Hervé le Tellier, en lice pour le Goncourt, perd dans une tempête en haute altitude et multiplie par deux, l’un qui atterrira à l’heure dite, l’autre deux mois plus tard avec exactement les mêmes passagers à son bord. Corinne Renou Nativel refuse d’en dire davantage (contrairement à quelques-unes de ses collègues).

Les petits éditeurs parviennent à s’infiltrer dans la rentrée avec l’anniversaire des éditions Cheyne (Matins bruns) souligné dans le MDL de la semaine dernière ou dans l’Huma aujourd’hui et avec Orange Export LTD pour leur travail sans relâche et sans relâchement. Mathias Enard a droit au Figlitt et au MDL sans une toutefois : il faut dire que son roman gastronomico-métempsychique semble nous conduire au bord de l’indigestion. Mais Thierry Clermont en fait ses choux gras truffant sa critique de termes comme « ribotes, récit à tire-larigot, ripopée » tandis que sa consoeur du Monde souligne pour sa part l’habileté de la construction romanesque.

Enfin sous le titre « Mademoiselle Bovary à Paris », c’est le Figlitt qui boucle le tour d’horizon critique du roman de Celia Levi (La Tannerie) , on y souligne comme partout ailleurs le talent d’écrivain «Ce livre dense qui exige une lecture lente, réalise le projet littéraire de Flaubert. » dit Alice Develey. Mazette !

La semaine prochaine, les finalistes des prix.