Teaser Audio de la semaine

par Frédéric Palierne

Une semaine qui navigue entre l’actualité des sorties programmées, autant en emportera le vent redécouvertes, et engagement avec des critiques qui s’intéressent aux combats de société.

 

 

La une du Figaro Littéraire pour Autant en emporte le vent. Tombés dans le domaine public, les droits du roman appelaient une nouvelle traduction, c’est désormais chose faite par Josette Chicheportiche. « Le film est un drame bourgeois, nous dit Astrid de Larminat, le roman une tragédie. »

Le dossier du Figaro, outre la reprise du récit, propose un article sur le Sud et la guerre (de Sécession) et un portrait de l’auteur qui présente quelques ressemblances avec son personnage principal.

Intéressant dans le contexte actuel, la critique donne les dernières lignes du roman dans la traduction de 1938 et celle de 2020 ; un extrait « Avec l’énergie de ceux de sa race, qui ne s’avouent jamais vaincus … » devient « Mue par l’énergie des siens qui refusaient de connaître la défaite… » la phrase anglaise nous vous l’offrons : « With the spirit of her people who would not know defeat… » nous vous laissons juges quant à la meilleure traduction.

Les écrivains en danger de censure voire d’emprisonnement existent toujours et cette fois, dans l’Huma c’est la figure d’Asli Erdogan qui se rappelle à nous ; homonyme de son tourmenteur, le président turc qui l’a fait condamner et emprisonner.

Elle en est sortie et donne un recueil de textes, Requiem pour une ville perdue, composé de poèmes en prose. « Longue errance sans retour possible nous dit Sophie Joubert, la quête de soi d’une écrivaine qui scrute son visage, cachée derrière des masques. » Elle ne se limite cependant pas à son histoire personnelle, celle des tourments qui lui ont été infligés, mais transfère dans des textes courts la poésie de la solitude d’une femme presque perdue dans la ville, sur l’histoire des quartiers de celle-ci, reflet d’une autre perte, celle de sa mère.

Claire Devarrieux évoque pour sa part le monde littéraire, celui des années 50-60 chez Gallimard à travers le journal de Jacques Lemarchand.

Ce troisième tome, « il tient son journal pour lui-même, pas pour nous autres, la postérité » est celui des aventures de la vie littéraire accomplie. Critique dramatique pour le Figaro littéraire, « va au théâtre chaque soir, paie sa place, évite les générales afin de ne rencontrer personne » Lemarchand défend l’avant-garde et se moque de tout ce qui n’est pas littérature.

Il participe également au comité de lecture de Gallimard et cherche à séduire sans cesse de nouvelles femmes, racontant explicitement sa vie sexuelle. Bref un homme de son époque, de la vie littéraire de son époque, pour qui ne compte que la vie littéraire de son époque.

Tout autre spectacle en une du Monde des livres avec le récit illustré de Thimothée de Fombelle chez Gallimard Jeunesse Alma, le vent se lève, récit consacré à l’esclavage, à la traîte plus précisément.

Raphaëlle Botte en souligne la nouveauté : au lieu de vouloir susciter l’engagement des jeunes lecteurs à tous prix l’auteur « avance, concentré sur la puissance de son récit, et c’est une arme bien plus redoutable. Jamais ses héros ne virent à l’archétype. Tous existent, souffrent, vibrent, empêtrés dans leurs destins et leurs secrets »

Dans le pêle-mêle

Déconfinement progressif pour Alaa El Aswany (Le syndrome de la dictature), de retour aux États-Unis après une curieuse parenthèse française qui l’a vu confiné à Marseille au lieu d’y donner un atelier d’écriture. Il n’hésite pas à établir un parallèle entre le régime américain et celui de l’Egypte pour Alexandra Schwartzbrod.

Jacques Rancières fait depuis quelques semaines l’actualité des idées avec un ouvrage qui ne parle ni de société face au virus, ni de violences policières mais qui pose la question du rôle paysage dans le basculement esthétique qui s’opère à la charnière des XVIII et XIXe siècles. Un essai qui, tout en évoquant la modernité, ne se limite pas à l’actualité.

Thierry Clermont (écouter audio) est journaliste au Figaro…et écrivain ; son livre Barroco bordello séduit ses collègues, de Christine Jordis pour le même Figlitt : « l’essentiel de ce livre (…) c’est la présence de la ville elle-même, La Havane. » à Alain Nicolas (l’Huma) qui en souligne la richesse culturelle de Desnos à Prokofiev ou Fangio ou encore, dans L’orient, le jour, Josyane Savigneau « lire son Barocco bordello, c’est déjà chaleur, rhum et littérature garantis. »

Après avoir connu les unes et les questions (finalement pas si essentielles consacrées) à son identité, voici le retour d’Elena Ferrante mais plus en pages intérieures. Si une majorité des lecteurs professionnels continue de la suivre en affirmant la solidité de ce nouveau roman (La vie mensongère des adultes, Gallimard), Florence Noiville du MDL commence à fatiguer ; Naples y est, d’accord, mais « En dépit de ces ingrédients familiers, quelque chose ne « prend » pas dans ce roman d’initiation pourtant lancé à grand renfort de marketing, en novembre 2019, par l’éditeur romain e/o et déjà acheté par Netflix. On ne s’attache ni ne s’émeut réellement ».