Derniers os à ronger avant les beaux livres.
Des unes contrastées encore cette semaine entre repêchages et coups de cœur, des idées, des saveurs, des histoires, un ensemble d’automne.
Avec Nagori à la une de son cahier livres, La Croix confirme la place de Ryoko Sekiguchi dans l’actualité.
Il faut dire qu’elle concentre les meilleures particularités de l’auteure japonaise moderne : d’un côté un titre tout en Japon, Nagori, à savoir « la nostalgie de la saison qui s’en va », de l’autre, un livre qui aborde le temps sous l’angle du goût, des saveurs puisque ( !) l’auteure vit en France.
Sabine Audrerie souligne l’intérêt de l’œuvre sous l’angle du goût « C’est bien avant tout la vie, la vitalité de la nature, de la littérature et toutes les couleurs de l’appétit que célèbre Nagori.» En fin de volume « le somptueux menu aux cent ingrédients qu’elle concocta à ses camarades pensionnaires de la villa Médicis » Et tout le long une réflexion sur les temporalités que nous habitons.
La question de la temporalité c’est celle aussi de la postérité nous dit le Figlitt Avec la figure d’Alexandre Soljenitsine.
Après La Croix et le Monde des Livres, c’est à son tour de célébrer la figure du grand écrivain. Car la postérité viendra de son style disent la plupart des auteurs et penseurs convoqués ici.
Paul-François Paoli retrace l’histoire des réticences à son œuvre en France ; il arrive au mauvais moment politique, l’élection de Giscard contre laquelle les forces de gauche se doivent d’être unies, PCF et PS. Son discours souligne le critique, heurte les centrales de la pensée « « si tu veux changer le monde commence par toi-même. » Rien, à cet égard, ne définit mieux le rôle assigné à la littérature et ce pourquoi elle est suspecte depuis toujours. Car nul n’est mieux placé qu’un écrivain pour décrypter les mensonges de l’idéologie. »
Et les mensonges des parents ? « Aucun parent n’est correct, en fait » nous dit Marie Despléchin qui vient de publier avec Claude Ponti Enfances à l’Ecole des loisirs.
Elle accorde un entretien à Frédérique Roussel de LibéL pour revenir sur le livre d’abord, enfances de personnages célèbres, enfances variées et souvent difficiles. Elle revient aussi sur ses engagements et sa vie, quant à son enfance à elle ? « Avoir des parents militants est une chance incroyable. » cqfd.
Le Monde ouvre pour sa part sur les lettres échangées entre écrivains catholiques : Bernanos Claudel Mauriac et Jacques Maritain.
Ce dernier le moins connu des quatre aujourd’hui, sert de pivot à l’article de Jean Birnbaum ; les auteurs ne se ménagent pas entre eux et se renvoient la balle à propos de prises de position qui nous semblent aujourd’hui assez éloignées du champ de l’action concrète ; et pourtant, à l’époque, chacun défend des positions idéologiquement repérables et s’interroge, convoquant les autres pour les juger. Un catholique n’a pas d’alliés. Correspondance Maritain-Bernanos-Claudel-Mauriac,édité par Henri Quantin et Michel Bressolette (Cerf).
Les chroniqueurs ont aimé Malacqua. Quatre jours de Pluie dans la ville de Naples dans l’attente que se produise un Événement extraordinaire pour Claro qui y voit un « texte à la rythmique incomparable, un texte orphelin » heureusement déniché par les éditions Do. Etienne de Montety se réjouit du roman de Betty Duhamel Gare Saint-Lazare. Réédité celui-ci narre les aventures d’une jeune femme plutôt de gauche et d’un homme qui lit Chardonne et Franck, l’automne décidément est le temps des redécouvertes.
Rencontres et portraits
On notera que le LibéL de samedi proposait un entretien avec Jean-Yves Jouannais qui revient sur l’expérience qu’il conduit et qui le dépasse presque, celle de l’encyclopédie des guerres qu’il mène depuis 10 ans au centre Pompidou.
Il s’arrête en 1945, pourquoi ? Les guerres continuent, non ? « L’objet que je cherche à travers les livres et les films, c’est la bataille pas la guerre. » On s’en persuadera aisément en lisant ce livre composé de citations ajointées ou non, parfois dans le même paragraphe, passant d’un auteur à l’autre sans vergogne, mais regroupées en chapitres thématiques qui font tout le sel de ce livre.
Pour le Figlitt la personne à rencontrer est Rebecca Dautremer qui écrit et illustre ses histoires.
Alice Develey invite à rencontrer cette auteur « Rebecca n’a rien du personnage mystérieux qu’on pourrait imaginer à la lecture de ses textes. Son ton est aussi frais que sa parole. » Elle assume ses œuvres qui ne font pas les yeux doux façon mièvreries pour enfants. Elle préfère une fois pour toute le Brueghel de son enfance au formes simplistes des livres pour mômes.
Enfin le Monde propose en dernière page de lire les mémoires de Vivian Gornick « (terme auquel elle préfère sans doute personal narrative, la narration personnelle), dont le si original Attachement féroce a fait d’elle une des maîtresses incontestées, enseignant cet art à l’université ou lui consacrant un ouvrage devenu canonique, The Situation and the Story (2001, non traduit) » nous dit Raphaëlle Leyris on connaissait d’elle depuis peu (2017) les histoires de sa mère, femme seule au verbe haut, pas facile, version mère juive pour fille donc, et maintenant c’est une déambulation attisant la mémoire à laquelle elle nous convie. (La Femme à part, Rivage