En s’éloignant de la rentrée, l’actualité littéraire  fait surgir des noms moins attendus que ceux qui ont occupé les unes ces dernières semaines, et des problèmes nouveaux.

 Les unes. En dehors de Gaël Faye et en attendant les prix cette semaine, les unes se font variées. Libé des géographes , la bible en image dans La Croix… Et l’amour dans le Figaro !

Le titre audacieux Pour une nouvelle littérature amoureuse s’appuie essentiellement sur le livre (et l’entretien) d’Alain de Botton Aussi longtemps que dure l’amour qui, on s’en doutera s’intéresse aux histoires d’amour qui durent : « les écrivains devraient s’intéresser à ce qui se passe lorsqu’on vit en couple depuis un certain temps. » Aimer, c’est pour lui, progresser dans la connaissance et le renforcement de l’autre ; foin du romantisme et de ses excès, du goût pour les histoires d’amour qui finissent mal : « Il est criminel de prétendre par exemple que Roméo et Juliette est une grande histoire d’amour. C’est l’histoire d’une pathologie adolescente ! ». Lucien d’Azay qui traduit le livre en a écrit un lui aussi Ashley & Gilda, autopsie d’un couple (Les Belles Lettres). A son propos Sébastien Lapaque se fend d’un papier légèrement moralisateur : « Au regard des tristes étreintes et des sentiments vils qui encombrent la production contemporaine, il apparaît que l’auteur d’Ashley & Gilda vagabonde dans son siècle à contre-époque » Ce dernier restera prédit-il alors que d’autres seront oubliés. (sur l’autre page du même dossier néanmoins, Repose-toi sur moi de Serge Joncour, une histoire d’amour reposant sur un coup de foudre, des étreintes et un peu de différence sociale). Elle est appréciée également.

Le Monde des livres met les rencontres de Blois à l’honneur en Une. A la question essentielle de l’année Partir qui articule bien évidemment un dossier autour des migrations fait écho l’entretien d’Alain Corbin et de son ancien étudiant Sylvain Vénère sur les rapports entre Histoire sensation et actualité. Ce dernier s’interroge au-delà des thèmes sur les méthodes Peut-être. « Mais je continue à penser qu’un livre d’histoire se construit à partir de la lecture de la bibliographie la plus exhaustive possible sur le sujet, puis de la constitution d’un corpus de sources, puis d’une méthodologie qui permette d’interroger tout ça. Si on n’a pas ces trois éléments, on peut toujours avoir le statut social de l’historien, on n’est pas en train d’écrire un livre d’histoire. Donc ma liberté réside dans le choix des sujets, bien sûr, mais plus encore dans la façon de les traiter en tenant compte de ces trois éléments, sous des formes originales, sinon insolites. » (Une guerre au loin, Anna-1883,Les Belles Lettres.)

Du côté des chroniqueurs
« Écrire c’est bien cela, nous dit Éric Chevillard qui a déjà une oeuvre derrière lui – non pas créer des mondes par le verbe, naïve illusion du romancier Idéaliste – mais combiner les données brutes qui constituent le nôtre, profiter du jeu entre les traités du réel pour provoquer de féériques tremblements de terre, proposer aussi des solutions aux énigmes qui pétrifient notre raison, quitte à sublimer quelquefois le rébus le plus plat. » C’est du roman de Pierre Senges qu’il est question, une série d’hypothèses à propos d’un tableau: « Mais le fil principal du livre reste ce périple accompli par une poignée de hauts personnages prétendument déchus de leurs droits et qui forment, accompagnés de leurs gens, dans l’imagination drolatique de Pierre Senges d’abord, puis à travers l’Europe, une longue caravane endurant le froid et les poux pour réclamer justice. » (Cendres des hommes et des bulletins).

Pour le Figaro c’est Etienne de Montety qui a aimé Jean d’Ormesson. Ce n’est pas franchement un pari risqué Jean d’Ormesson serait devenu un manieur de concepts? On est vite rassuré « l’hédoniste aborde rapidement des notions moins savantes que l’espace et la matière : le plaisir, bientôt surpassé par le bonheur, lui-même supplanté par la joie. » Parfois l’hommage prend une drôle de tournure (Guide des égarés, Gallimard.)

Sujets croisés pour Bruno Frappat (Livres&idées) et Jean-Claude Lebrun (le rendez-vous de livres. D’un côté Laurence Tardieu qui choisit d’évoquer la maison de son enfance face au climat de peur généré par les attentats de Charlie (A la fin du silence, Seuil), de l’autre le roman de Luc Lang : Au commencement du septième jour (Stock) salué par la critique (et notamment Jeanne Ferney de La Croix). Difficile de trouver plus achevé dans l’offre de la rentrée d’automne dit Jean-Claude Lebrun. Comme sa consœur de La Croix, il remarque qu’il s’agit là d’un roman plutôt géographique. Mais l’essentiel du roman est au-delà « Rarement écrivain n’aura saisi avec autant de précision et de lucidité ce qui peut se jouer dans l’espace d’une vie, entre deux ténèbres qui lé bornent. ».

Les auteurs de la semaine

Après Cesaria Evora dont le refrain « Petit pays je t’aime, je t’aime, petit pays je t’aime beaucoup » était sur toutes les lèvres, le livre de Guillaume Faye intitulé, lui aussi Petit pays fait la Une de beaucoup de journaux (Grasset). Cette semaine Libération c-à-d Maria Malagardis le rencontre et donne quelque pistes supplémentaires sur ce succès : l’auteur nous dit-elle « a quitté une vie confortable de trader à Londres pour se consacrer à sa passion, la musique. » En définitive c’est la littérature qui lui vaut la renommée. Il écrit sur la recommandation d’une éditrice qui sent le style dans ses textes de rap. Résultat ce roman consacré à une bande d’enfants, vivant dans une impasse africaine au Burundi charme tout le monde. Le moins qu’on puisse dire c’est que le contexte (tragique) est connu (voir Hatzfeld) et qu’il n’est donc pas si facile de surprendre la critique ; et Pour Muriel Steinmetz (une du Rendez-vous des livres cette semaine) qui dit que l’auteur écrit à hauteur d’enfant. C’est aussi le titre de Libération.

Portraits de la semaine .

Jonathan Coe en écrivain décomplexé, qui n’est plus retenu par de sombres hésitations) : « Reste l’envie de raconter des histoires, de se faire plaisir. J’écris sur la vie contemporaine. Mon style est simple car ce qui m’intéresse vraiment c’est la structure de l’histoire. » Dernière page du Figaro.

Le Monde des livres s’attarde pour sa part sur Amélie Nothomb et c’est Jean Birnbaum, le directeur de la publication qui s’y colle, serions-nous tentés de dire : « adolescente, je me vivais comme une monstruosité de la nature, je me sentais exclue à cause de ma laideur. » Cette fois encore un conte avec Riquet à la houppe. On apprend deux choses cependant. Reçue à l’académie Royale de Belgique :

1) Elle occupe le fauteuil de Simon Ley

2) on aperçoit hygiène de l’assassin derrière Coulibaly dans la vidéo qu’il laisse derrière lui après ses crimes.

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