Cette semaine l’héroïne de la presse a 150 ans et elle se prénomme Alice. C’est bien évidemment de l’Alice au pays des Merveilles dont il s’agit, celle qui fait la Une du Figaro littéraire et du Monde des livres. On peut s’interroger longuement sur ce que cette œuvre apporte et pourquoi elle est aussi intemporelle…(écouter la suite sur le teaser audio)   Cette semaine, retour vers une actualité moins tragique ; si le salon du livre de Montreuil qui s’annonce impose de parler livres pour la jeunesse il est temps d’évoquer des œuvres moins directement présentes dans les débats quoique déjà sur les tables des libraires.

Les unes

« Ma sorcière bien nommée » ce jeudi pour Libération et son cahier livres, tandis que le Figaro littéraire s’intéresse de plus près au personnage d’Alice, il y a comme un parfum de conte de Noël. Voir, car pour les sorcières, il s’agit du très sérieux La sorcellerie démystifiée de Réginald Scot qui connait ainsi sa première traduction en français…il est publié en 1584.Robert Maggiori fait un rapide tour d’horizon des idées novatrices défendues par cet auteur qui remet à leur place démonologues et théologiens de tous poils, prompts au bucher mais aussi sots que cruels face à des femmes dont certaines souffrent de troubles psychiatriques ; « une telle entreprise à l’heure où la raison commençait à poindre sous la croyance suscite d’abord de l’enthousiasme (…) mais très vite le naturel revient au galop » nous dit le critique qui signale la réaction virulente et unanime du camp de l’obscurantisme.(ED.Jérôme Million).

Quant à Alice, c’est son 150e anniversaire cette année ce qui lui vaut une place de choix au salon du livre de Montreuil (du 2 au 7 décembre). François Rivière raconte comment Charles Dogson s’inspirant d’une Alice réelle qu’il fait souvent poser pour ses photographies devient l’héroïne de cette aventure de pure fantasy, comme disent les anglo-saxon. On a donc droit à l’édition bilingue tirée à seulement mille exemplaires (Editions des Saints-Péres), une nouvelle édition illustrée par Rebecca Dautremer (Gautier-Languereau)… A signaler dans le dossier l’intéressant article de Françoise Dargent sur les trésors dormants de la BNF , cette dernière semble vouloir se lancer dans une entreprise de réédition de ces livres « rares ».

Dans la presse également Côté redécouverte des grands écrivains c’est toujours Raymond Carver qui tient la corde, cette semaine c’est le Figlitt qui consacre une recension à sa biographie par Carol Slenicka ; huit cents pages serrées nous dit Bruno Corty, origine, évolution Bad avec sa famille et Good avec ses amis poètes, nous dit le critique. A noter que le Figlitt rend hommage à Foucault l’ incendiaire comme le dit Robert Redeker dans son article : « La traversée des grands livres de ce philosophe débouche sur un constat : Foucault est un incendiaire. Oui, ses livres sont des incendies – de la prison, de l’asile, de l’école, de la caserne, de l’hôpital, de tous ces lieux d’institution qu’il appelle avec horreur « lieux d’enfermement ».

Littérature monde 

L’écrivain mis en avant par LibéL c’est Jon Kalman Stefansson dan son édition de samedi pour D’ailleurs les poissons n’ont pas de pieds (Gallimard) l’occasion de se familiariser avec l’Islande, l’auteur s’entretien avec Natalie Levisalles extrait « En faisant ça j’essaie de trouver Dieu, Qu’est-ce que Dieu ? Qu’est-ce que la mort ? Y a-t-il une vie après la mort, etc. Des questions normales quoi ?- A quoi ressemble le Dieu auquel vous pensez ? – (…)Ce que je sais c’est que Dieu n’est pas un homme blanc entre deux âges » ils abordent aussi les personnages de femmes et l’alcool dans ses romans et toujours cette expression simple directe mais non dépourvue d’humour.

La littérature lusophone n’est pas un mirage, confère la carrière d’écrivains comme Mia Couto (Mozambique) ou bien encore, plus récemment, l’Angolais Ondjaki. Ce dernier nous dit Gladys Marivat dans le MDL pourrait être le digne représentant du réalisme magique mais il ne suit guère la veine du merveilleux pour le merveilleux « quand j’étais adolescent, ma grand-mère passait son temps à me raconter des histoires. Depuis je ne fais pas la différence entre la vie et les contes. ». Son roman Les transparents (Métailié) décrit la vie dans un immeuble de sept étages abritant une source miraculeuse puisque inépuisable. Écrivain de la ville (Luanda), il développe cette thématique de l’immeuble qui pourrait constituer de La vie mode d’emploi à L’immeuble Yacoubian un genre littéraire à part entière.

Côté chroniqueurs

Mathieu Lindon consacre son portrait à l’agenda 1906 de Marcel Proust, un « agenda de poche, « de fabrication anglaise » » comme le rapporte le critique ; beaucoup d’aspects de la Recherche s’y trouvent évoqués tandis que la rédaction est bien avancée ; ce document « génétique » comme il est convenu de l’appeler aujourd’hui est d’autant plus intéressant qu’il est gratuit. (BNF OpenEdition Books). Pour Lindon « Robert Gangnat, homme d’une grande bonté et oncle de Gaston Gallimard, serait « une des sources du personnages de Bloch » ».

Pour Etienne de Montety dont la chronique de la semaine est consacrée au texte Mélancolie d’Emmanuel Berl d’Henry Raczymov chez Gallimard, c’est cet auteur aujourd’hui un peu sorti du champ de nos préoccupations qui constitue en fait le modèle qui aurait servi pour le personnage de Bloch dans La Recherche. Préoccupations en apparence futiles mais bien essentielles au contraire .