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Des suppléments éparpillés cette semaine pour cause de grève, certains le mercredi avant manif, d’autres après manif, mais, bon, tout le monde est là. De Bret Easton Ellis qui continue sa tournée des unes avec un peu partout mêmes propos et mêmes photos, à Pierre Michon, dont c’est le grand retour célébré comme il se doit dans Le Monde et le Figaro et d’autres qui nous assurent, comme Marie Desbiolles « qu’il n’y aura pas de sang versé ».

 

 

LES UNES

Cette semaine, le Monde des Livres nous le fait savoir, c’est le retour de Pierre Michon. Ce « classique contemporain » qui ne fait rien comme tout le monde nous donne le deuxième volet d’un texte commencé en 1996. Ou disons qu’«il en livre aujourd’hui, non pas la suite, mais le miroir grossissant, à la manière d’un diptyque » nous dit Thierry Clermont du Figlitt.

Raphaëlle Leyris salue pour sa part la performance de la continuité : « ce qui frappe d’emblée est un miracle : alors que tant d’années se sont écoulées, il parvient immédiatement à relancer la tension érotique presque hallucinée qui porte le premier texte. » Il ne s’agit bien entendu d’aucun achèvement réel, tout au plus d’un apaisement passager, au sein d’une œuvre complète, courte, mais d’une densité renforcée par la langue du « narrateur » de l’ombre, comme le définit Claudio Magris, nous dit encore Thierry Clermont.

Samedi, dans le LibéL, c’est la deuxième une de Bret Easton Ellis. Interview par Olivier Lamm et les mêmes réponses peu ou prou que dans le reste de la presse ; son livre est sincère, il y pense depuis qu’il est jeune et, non il ne prend plus de drogue. « Beaucoup de gens seront étonnés d’apprendre que je suivais un planning, que je faisais mon lit avant de m’installer à mon bureau le matin ». Bref, on en revient à l’histoire, mélange de sa jeunesse et dune histoire de serial killer. « En écrivant enfin les Eclats, j’ai réalisé à quel point les événements de l’intrigue ont influencé mes autres romans. L’obsession pour les tueurs en série, les fêtes mondaines. » et la littérature dont il a dit qu’elle était en train de disparaître de la vie américaine ? « (Il soupire) C’est une ânerie. A laquelle je crois certains jours. »

Et de continuer dans le Figaro à propos des « sensitivity readers » : « Oui j’utilise le N-word » (le mot « nègre ») dans un certain nombre de mes livres. A ceux qui ce sont offusqués de voir un tueur en série raciste dans American Psycho, je réponds qu’ils aillent au diable ! Les pop stars et, les rappeurs peuvent utiliser à gogo le mot « nègre » et ça ne choque personne. Si un blanc, en revanche, ose le faire, même dans une œuvre de fiction on le détruit. » Il est sollicité sur la question par Bruno Corty. Le reste de l’interview tourne peu ou prou autour des thèmes développés dans les autres médias, choix de revenir sur sa vie, erreur de se lancer dans une carrière hollywoodienne et vilain petit canard des lettres.

Ce jeudi ce sont les murs d’images d’écrivains qui attirent Frédérique Roussel du LibéL ; Cette drôle de pratique qui consiste à recouvrir d’images au moins un mur de son cabinet de travail, quand ce n’est pas tout l’espace consacré aux collages comme chez Ramon Gomez de la Serna, est très répandue chez les écrivains. Elle rappellera les murs tapissés de clichés que l’on trouve dans certains films américains, mais il s’agit, pour le livre qui les recense d’aller au-delà et de l’analyser en tant que pratique. « Murs d’images d’écrivains montre les fonctions de ceux-ci, que ce soit pour se revendiquer d’une famille artistique, représenter un panthéon mémoriel, se portraiturer soi-même, instaurer une présence à qui s’adresser ou servir de « tremplin vers la fabrique littéraire » nous dit la critique. Aby Warburg quand tu nous tiens.

Il n’y aura pas de sang versé nous assure Marie Desbiolles en Une de La Croix. C’est le titre de son dernier ouvrage dans lequel elle romance la première grêve de femmes connue, en 1869 dans les filatures lyonnaises. En suivant quatre femmes parmi les 2000 qui s’engagèrent à l’époque, elle restitue le quotidien des femmes exploitées qui se relaient sans interruption dans leur métier de fileuses industrielles. Elle-même poursuit à travers ces figures son métier d’écrivaine : « Approfondissant livre après livre, une réflexion sensible autour d’une littérature « du mouvement », la poétesse provoque à coup sûr la rencontre. Entre elle et son lecteur, entre celui-ci et ses personnages. »

Dans le pêle-mêle

Dubravka Ugresic est décédée le 17 mars et voici que paraît une œuvre qui ne peut même pas être qualifiée de posthume, si l’on tient compte des délais de l’édition et c’est une œuvre qui évoque la littérature. Nul doute que l’on reparlera de cette auteure croate, réfugiée à Amsterdam pour échapper aux procès nationalistes d’une Yougoslavie atomisée. Amsterdam, c’est précisément la ville que fuit Willem Frederik Hermans, dont il est question dans le Figlitt et LibéL. Les deux célèbrent cet auteur à la fois cruel, précis et talentueux dont on republie, dans une bonne traduction cette fois, un roman de 80p. « Tout système de pensée humaniste ou progressiste lui paraissait inapte à rendre compte du chaos universel, de la tristesse de la condition humaine, de l’amoralité foncière de l’être humain. » nous dit Astrid de Larminat.

Portraits/Entretiens

On peut donc rencontrer Bret Easton Ellis en une du Figlitt et du LibéLS, carton plein, on nous a épargné La Croix et l’Huma. Sacrés Américains !

Jean Van Hamme ferme la page rencontre du figlitt avec une nouvelle aventure, prendre la suite d’Edgar P. Jacobs sur une série autre que celle des Blake et Mortimer, à savoir le rayon U.

Quant à Treize qui écrit sur la psychiatrie et ses ravages dans un récit qui s’éloigne de ses performances slam et rap d’avant, on la rencontrera en dernière page du MDL.

Une semaine riche en actualité et pas seulement sociale.