L’homme n’a pas de racines, il a des pieds » J’adore cette phrase nous dit Riad Sattouf dans le LibéL de ce samedi (26/11). Dans l’entretien qu’il accorde à Virginie Bloch-Lainé, il cite donc Salman Rushdie et multiplie les réflexions sceptiques voire critiques sur la création littéraire aujourd’hui : « Je lis très peu ce qui sort et jamais pour me tenir au courant de ce qui se fait, ni pour me détendre. » Il insiste sur ce dédain et se montre d’une manière générale assez peu tendre pour les écrivains contemporains. « Quand on fréquente des auteurs, on sait comment ils sont. C’est assez loin de leurs livres ! » , « j’ai du mal à comprendre que l’on puisse se revendiquer auteur anticapitaliste engagé en étant édité par un groupe appartenant à des héritiers milliardaires sur plusieurs générations. C’est une sacrée dissonance cognitive, non ? » Non, ce n’est pas de la dissonance cognitive mais une ambivalence.

Deux jeunes femmes « croquent leur entourage, se rient des prétendants, dans un savant mélange d’anglais et de latin, de messages codés et de noms empruntés à la littérature. » Jeunes juives « issues de la bonne société parisienne », l’une reste à Paris, l’autre se sauve nous dit Fabienne Lemahieux de La Croix : leurs échanges mettent en lumière leur proximité aux accents amoureux. Hélène est la plus forte dans l’échange face à la mélancolie de son amie dans leur correspondance. Elle sera brisée par l’Histoire.

« Je commence à croire que je suis trop libertaire pour écrire jamais dans un journal d’école socialiste » L’auteure se nomme Séverine, journaliste formée à la presse du XIXe siècle par Jules Vallès. Elle reprendra le Cri du Peuple tout en soulignant ses réticences à suivre un dogme politique. Dans son article, Frédérique Roussel évoque autant cette figure du monde journalistique libérée et sincère, que les femmes qui ont décidé de mettre en lumière son œuvre en passant par un travail de réédition autant que par des manifestations dans sa maison de Pierrefonds. Sauvetage de ce patrimoine, résidence d’été pour femmes journaliste, prix donné à une journaliste, l’ensemble du projet vise à entretenir l’idéal de Séverine.

L’Humanité, partenaire du salon du livre jeunesse de Montreuil fait le forcing cette année, avec quatre pages de titres et un entretien avec Blexbolex. Ce dernier fait l’éloge de la magie dans un album très élaboré graphiquement. La plupart des références du cahier sont plus facilement accessibles mais soulignent, une seule fois par an (!) la vitalité du secteur et une certaine forme d’abnégation de la part des auteurs qui tentent de survivre à la concentration des éditeurs et à la montée de la censure. Une vingtaine de titres pour près de quarante ans d’existence du SLPJ. « En plus d’être notre contemporain il est un classique »

Après Jean Dutourd, c’est Blaise Cendrars qui se voit convoqué en une du Figaro littéraire cette semaine. Le poète, le Marcheur de la Légion étrangère, comme le souligne François Sureau interviewé sur son goût pour l’auteur : « S’il est toujours lu, et reconnu aujourd’hui, et à juste raison, c’est parce que Cendrars est par excellence l’homme éclaté, l’homme dispersé, dans un monde éclaté. » Et plusieurs (re)parutions l’inscrivent dans l’actualité, réédition du livre illustré par Fernand Léger, et en poche Trop c’est trop « Un ouvrage en forme de « presse-papiers », comme il l’a appelé, où Cendrars a rassemblé portraits, articles buissonniers, remémorations profuses. Vagabondages panoramiques, nouvelles. »

Après LibéLS (12/13 – 11) c’est au tour du Monde des livres de placer en une le grand roman mi SF mi SM du Japonais Shozo Numa. François Angelier, spécialiste des mauvais genres nous indique que « l’auteur serait l’écrivain japonais Tetsuo Amano (1926-2008), correcteur dans l’édition, auteur de nombreux récits érotiques, et surtout masochiste revendiqué dont la suprême jouissance consistait à de faire passer pour attardé mental et à être traité tel un animal de compagnie par des femmes qu’il servait par ailleurs comme domestique. » Un destin assumé qu’il fait partager à la plupart de ses personnages masculins transformés en objets de toutes sorte, du mobilier au sex-toy dans la civilisation extraterrestre fondée sur le pouvoir absolu des femmes blanches. Une manière également d’affronter le récit de la défaite dans le Japon de l’après-guerre.

Dans le pêle-mêle

Hommage à Christian Bobin dans le LibéLS et le MDL. Frédérique Roussel souligne l’authenticité de son écriture en rappelant qu’il a été en butte aux critiques les plus acerbes quant à la simplicité de son travail : « Les mots de Bobin sont des lanternes en plein jour. Rassurons les économes de l’énergie : ces lumières-là n’en consomment pas. Il faut juste les étreindre de temps en temps… À ceux qui l’ont croisé, lui aussi aurait pu dire, tel Diogène : « je cherche un Homme ». Vaste programme, dans une société qui n’aime rien tant que disséquer les générations (X,Y,Z…) pour y déceler des généralités successives et sans filiation. » Dans le MDL, Jean-Louis Jeannelle rappelle lui aussi qu’il a été incompris, moqué puis qu’il est devenu une « référence incontournable de lecteurs en quête de spiritualité ».

Portraits/Entretiens

On peut rencontrer Mia Couto écrivain mozambicain dans la page « Mots de passe» du MDL.

Sophie Nordmann, philosophe, spécialiste de la transcendance est la rencontre de la dernière page du monde.

Riad Sattouf est dans le LibéL (26/27-11)

François Sureau est cette semaine dans le Figlitt à propos de Blaise Cendrars dont il retrouve la trace en forêt des Ardennes quant à Blexbolex, qui fait ses textes et images, il est dans l’Huma pour évoquer son monde magique.

Une semaine saturée de références, Noël s’approche.

Index des auteurs cités dans les suppléments littéraires de cette semaine (cliquer ici pour télécharger)