Livraison un peu particulière cette semaine avec une nouvelle rubrique consacrée aux portraits. Il s’agira simplement de signaler ces chroniques qui ont petit à petit envahi la presse à mesure que la personnalisation de l’auteur prend le pas sur son œuvre (parfois). la suite dans le teaser audio…

 

Portraits d’écrivains

Il n’y a pas si longtemps, les suppléments littéraires se contentaient, en guise d’illustration de quelques dessins, voire d’une photographie noir et blanc représentant sujet ou écrivain. A présent et chaque semaine, le portrait couleur occupe une bonne partie de l’espace critique.

Il y a peu c’était l’écrivain dont on parle beaucoup en cette rentrée, Jean-Paul Dubois de trois quarts dans un clair-obscur qui regardait sur le côté par la fenêtre de son appartement. La posture du guetteur, assez proche de celle du voyeur (se souvenir de La jalousie) fait partie de celles que l’on attribue volontiers à l’écrivain, témoin de son temps. On y découvre cependant un auteur qui ne planifie pas son oeuvre suivant ses impulsions, trouvant ses sujets en traînant, comme il le dit lui-même (La Succession, L’Olivier). Marcher, se promener, traîner, une autre manière de dire prendre le temps.

 

Céline Minard apparaît pour sa part en une du Rendez-vous des livres, le cahier livres de l’Huma. Jusqu’ici on a peu de cliché représentant l’écrivaine, il est vrai que son oeuvre oscille entre personnages solitaires dans l’affrontement Bastard Battle, Faillir être flingué,(Tristram,Rivages) et d’autres seuls avec eux-mêmes (Le dernier monde, Folio). Elle est au centre de la page regard direct, pas de pose, c’est sa marque et celle de son écriture : Le grand jeu, son nouveau récit tient de cette dernière veine ; il interroge la volonté de solitude, la valeur d’une expérience qui consiste à se retirer du monde.

 

En dernière page du Figaro Littéraire c’est le tour d’Ivan Jablonka, qui le dit et le redit d’autant plus sûrement qu’il est récompensé depuis peu par le prix du Monde des Livres : « je suis un écrivain en sciences sociales » et plus encore « mon projet est une quête de vérité et de justice » (Laëtitia, Seuil). Un véritable débat est engagé aujourd’hui pour savoir si c’est bien là le rôle ou la place de l’écrivain.

En clôture du Monde des livres on découvrira cette semaine Emily Saint John Mandel l’écrivaine diaphane qui est attachée aux îles et qui écrit un roman apocalyptique dont on parle beaucoup en cette rentrée. Que faire après que la grippe a ravagé le monde et fait disparaitre toute forme de technologie, survivre mais pas uniquement, reconstruire nous dit cette auteure, reconstruire grâce à la culture et pourquoi pas grâce à une troupe théâtrale itinérante. (Station Eleven, Rivages).

 

Enfin c’est un personnage qui ouvre l’édition de Libération du jeudi 17 septembre, Claude Perdriel, qui, après avoir été patron de presse (Le Nouvel Obs, le Matin, se confie à sa biographe (Sans oublier d’être heureux, Stock). Si le titre peut sembler conventionnel, le contenu nous assure Frédérique Roussel qui fait de ce livre une priorité parmi les biographies de la rentrée est saisissant et pas seulement pour les journalistes. C’est aussi parce que l’auteure, Marie-Dominique Lelièvre a composé ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui un « page turner », autrement dit un livre dont les pages se tournent toutes seules.

 

Seul un journal n’affiche pas de portrait en Une ni à la fin de son cahier ; La Croix qui semble résister à cette mode continue de choisir l’illustration photographique le plus souvent et cette semaine c’est une jambe de soldat en une, qui pend dans le vide en suspension dans un hélicoptère, c’est le thème du livre d’Harry Parker, un corps brutalement mutilé par une explosion et le livre qui raconte l’histoire du soldat à travers les objets du quotidien. Anatomie d’un soldat (Christian Bourgois).

 

Pendant ce temps Le dossier du Figaro littéraire et son portrait de Une c’est Marie Antoinette et les récits ou les livres d’histoire qui tournent autour du thème, comme celui de Jean-christian Petit-fils consacré à la Bastille, dont il retrace l’histoire complète (Mystères et secrets d’une prison d’état (Taillandier).

 

 

Côté chroniqueurs.

 

Le bon fils, titre antiphrastique tant ce bon fils déteste et son père et l’école où il peine : « on peut lire le bon fils comme une critique du social, la nécessité de se soumettre à un modèle de quelque ordre que ce soit », « le livre est une « sorte de conte de fées »poursuit Mathieu Lindon exagéré et paranoïaque où manqueraient longtemps les fées. »

Pour Etienne deMontety L’archipel d’une autre vie d’AndreI Makine est le livre de la semaine. Le roman renvoie à des images bien connues dans une Russie soviétique dans laquelle des ordres iniques peuvent modifier les destins. Il raconte une poursuite, mais c’est une quête dit en substance le critique.

Bruno Frappat préfère Repose–toi sur moi de Serge Joncour, histoire improbable d’amour et même d’un peu de couple maudit grâce « à l’habileté d’un scénario brillantissime, où se mêlent les emportements de l’amour et les terreurs de la nuit. » Marcher droit, tourner en rond a séduit Eric Chevillard (Bernard Venet, Verdier.)